
Au Népal, les déesses vivantes vont à l’école…. Toute visite dans la ville de Kathmandu inclut un moment pour voir la déesse vivante. En fait il n’y a pas « une » mais « des » déesses vivantes dont la plus célèbre est en priorité celle de Kathmandu qui fut la déesse royale. Puis, bien plus rarement voit-on celle de Patan et en tout dernier et très rarement visite-t-on celle de Badgaon. Mais il y a encore bien plus de déesses, pratiquement chaque petite ville a sa déesse. L’étonnement des visiteurs est bien sûr énorme et se transforme toujours en une réflexion pessimiste puis négative sur le sort de ces petites filles. A l’heure où en Occident les gamines de douze ans ont flirt et liberté bien grande pour leur âge, ici au Népal une déesse vivante du même âge sort tout juste d’une période d’environ sept à huit ans de représentation divine et est jetée dans la vie quotidienne sans préparation, inadaptée à un futur plus basé sur le matérialisme qu’on peut l’imaginer. Jusqu’à ce jour, l’institution de la Kumari, déesse vivante représentant la force féminine vierge, a survécu. La période maoïste qui a marqué l’Histoire du Népal ces dix dernières années remet en question son existence et conteste la maigre pension donnée dans le temps par le roi du Népal et maintenant par le gouvernement. Ce minuscule pays officiellement peuplé de vingt-huit millions d’habitants avec environ huit millions de leurs ressortissants installés en Inde, se balance entre le vingtième et unième siècle et le moyen âge. La tradition antique d’une déesse vierge est encore d’actualité ici au Népal, seul pays au monde à la faire survivre. Le temps passe et l’évolution s’implante tout de même. La Cour Suprême a ordonné que l’instruction des déesses soit obligatoire. La déesse de Patan étudie en semaine mais, comme elle ne peut aller à l’école, son précepteur rémunéré par sa famille, vient à domicile lui enseigner les matières que les autres apprennent sur les bancs d’une classe. Il en est de même pour ses homologues de Kathmandu et Badgaon.. Il y a bien sûr des oppositions à cette fonction de Déesse vivante… Une avocate (Etre avocate au Népal n’est pas si commun) pointe que le rôle suranné de la déesse est même une forme d’esclavage… mais, pour le peuple Newar de la vallée et les autres ethnies, son existence est un réconfort dans le contexte d’une vie difficile, avant, pendant et après l’arrivée des Maos. Le culte de la puissance féminine a été actif dans de nombreuses sociétés dans le monde depuis la haute antiquité et a même joué un rôle important dans les civilisations méditerranéennes et de l’Asie mineure. Au 3ème millénaire av. J.C, des témoignages archéologiques relatifs aux célèbres villes de Mohenjo - Daro et Harappa prouvent son existence dans le sous-continent indien où l’énergie féminine est divinisée et toujours vénérée mais c’est au Népal que ce culte perdure de façon la plus intense sous forme anthropomorphique.